Le jeudi 23 février 2023 Idrissa Diabaté a définitivement rangé la caméra. C'est le clap de fin pour un cinéaste prolifique qui aura réalisé une cinquantaine de films. On peut citer pêle-mêle "La femme porte l'Afrique", "Bois sacré du Pr Laurent Aké Assi" ou encore "Jean Rouch en Afrique, l'homme à la caméra de contact". Sa passion pour les faits sociaux en Afrique fait de lui un documentariste hors pair.
Fraternité Matin
Biographie
Né le 1er Janvier 1948 à Duékoué (ouest de la Côte d'Ivoire) Idriss Diabaté est un réalisateur, scénariste, chercheur ivoirien. Titulaire d'une thèse de troisième cycle en communication pour le développement en milieu rural, Idriss Diabaté est également chercheur associé au centre d'enseignement, de recherche en communication (CERCOM) de l'université Félix Houphouët Boigny d'Abidjan. Il enseigne l'audiovisuel à l'Institut National Supérieur des Arts et de l'Action Culturelle (INSAAC). Il réalise depuis 1986 des documentaires qui lui ont valu plusieurs lauriers dont le NISA d'or, le grand prix Youssef Chahine ou encore le prix documentaire du FESPACO.
UNE OEUVRE IMMENSE ET UN RICHE HERITAGE
Atoo
Auteur d'un cinéma engagé il prend fait et cause pour les modestes gens en racontant les conditions de vie difficiles des femmes africaines dans "La femme porte l'Afrique" ou encore le combat inégal entre de pauvres paysans maliens et la multinationale américaine Monsanto responsable d'avoir introduit des organismes génétiquement modifiés (OGM) dans le plantations de coton du pays causant le suicide de plus d'une centaine de personnes. Ce film "Sénékélaw Ka Kuma" raconte le désarroi de ces pauvres paysans abandonnés. Idriss Diabaté s'intéresse également à d'autres artistes notamment des peintres dans les films "Yankel! l'Afrique à l'atelier" portait d'un peintre français qui a formé plusieurs grands peintres ivoiriens et "Parole sans paroles" où le réalisateur montre le peintre béninois Ludovic Faidaro travaillant dans son atelier situé à Abidjan. Petit à petit on entre dans l'univers de ce peintre singulier. Avec cette disparition l'Afrique perd une voix qui porte. Le réalisateur laisse un lourd héritage à la jeune génération de cinéastes à qui il expliquait: « Faites le cinéma avec le moyen que vous avez. Il y a des moyens aujourd’hui qui peuvent nous libérer des images qu’on nous gave tous les jours. Franchement, on peut le faire. Je m’adresse à vous, jeunes cinéastes qui veulent faire le cinéma. Détachez-vous des contraintes techniques. Libérez-vous. Plongez-vous dans l’action. Vous allez voir qu’il y aura de bons résultats »
La disparition du doyen du cinéma documentaire en Côte d'Ivoire a suscité beaucoup de réactions dans le monde du cinéma à quelques heures de l'ouverture du FESPACO 2023. Ainsi Yacouba Sangaré, président de Grand écran, association des critiques de cinéma ivoiriens, témoigne : « C’est un travailleur acharné, un réalisateur talentueux et passionné ».
Le réalisateur argentin Pablo César raconte: « J'ai rencontré Idriss en juillet 1989 à Tunis dans le cadre du Festival international du film de Kelibia (...)nous étions tous les deux membres du jury de ce magnifique festival. Idriss est un réalisateur talentueux» tout en appelant à un hommage lors du FESPACO2023. Il ajoute : « Avec Idriss nous avons parcouru le nord de la Côte d'Ivoire en juin 2018 en montant tout le projet du film ’’Le jour du poisson’’ coproduction Argentine-Côte d'Ivoire » . A l'annonce de son décès plusieurs messages étaient unanimes pour dire: Paix à ton âme l'artiste. Respect!!!
AIP
Filmographie :
Quelques films marquants:
- Jean Rouch en Afrique: l'homme à la caméra de contact (2017)
- Crise ivoirienne: un homme, Choi (2012)
- Bois sacré du professeur Laurent Aké Assi (2011)
- Yankel! l'Afrique à l'atelier (2010)
- Œil à l'oreille (2010)
- La femme porte l'Afrique(2008)
- Sénékélaw Ka Kuma (2006)