« C’est pas ton ami ? », demande-t-on quand à l’horizon, se dessine une silhouette bien trop familière pour passer inaperçue. Avec leurs cheveux gominés et leur Teddy façon Ivy League, Rudy (Jonathan Feltre), Ahmed « Rico » Morslaoui (Missoum Slimani, vu notamment dans Baron Noir), Mandal (Marvin Dubart, Mortel), et le reste de la bande, se font remarquer. Par de jeunes femmes mais aussi et surtout par des néonazis prêts à en découdre. Explications.
PARIS C’EST TRAGIQUE
1984. Emmené par un certain Jean-Marie Le Pen, le Front National – depuis devenu Rassemblement National – réalise une percée politique : 11% aux Européennes.
Et si elle ne l’a pas vue venir, cette montée-là, la bande à Rudy subit depuis des années maintenant celle du racisme à coups de coups de pied et de poing donnés par de lâches blancs anti-immigration entre autres. Un déchaînement de violence qui est à l’origine de la formation de ce groupe de joyeux lurons parisiens.
Quand ils ne tentent de draguer des filles dans la rue, qui les laissent en « vu », ces garçons à la mode, des années 80, commettent quelques larcins ça et là. Avec l’ombre des skinheads qui plane au-dessus d’eux. Encore plus quand l’un d’entre eux tabasse un de ces jeunes blancs au crâné rasé qui s’est repenti. C’est le déclenchement d’un nouveau cycle de violence, avec Adam (Victor Meutelet, Emily In Paris), chef des skinheads, qui ira loin, très loin.
NOUVEAUX VISAGES
Que ce soit Rudy/Jonathan Feltre, bien sûr, mais aussi Rico/Missoum Slimani mais aussi Mandal/Marvin Dubart, etc. Ce sont des visages assez peu connus du cinéma français que le réalisateur Jimmy Laporal-Tresor, notamment coscénariste de Mon Frère, drame avec MHD, a choisis de montrer pendant 1 heure et 45 minutes. Histoire de bien jeter un regard nouveau sur une partie de l’histoire française.
LA VIOLENCE AU SERVICE DE LA MÉMOIRE
Disponible sur les plateformes de téléchargement légal comme Apple TV, Les Rascals braque les projecteurs sur l’importante année 1984 et la création de SOS Racisme avec son slogan frappé sur une main jaune : « Touche pas à mon pote ».
C’est aussi un film coup de poings.
spoiler: Le passage à tabac de l’ancien skinhead dans sa boutique de disques, l’agression à arme blanche d’un collecteur d’affiches communistes, etc. La violence est présente, disséminée tout au long du film. Et c’est difficile à voir, quand ce n’est pas à entendre avec spoiler: le bruit de ce violent coup de batte de baseball qui frappe le crâne d’une jeune métisse.
Mais ces passages sont ce que la RATP et la SNCF sont aux transports en commun : un service public.
Pour son premier long-métrage, Jimmy Laporal-Trésor décide de s’en servir pour parler d’un temps pas si lointain que ça où des skinheads faisaient régner la terreur dans les rues, sur les terrasses de Paris, etc. Devoir de mémoire nécessaire à une époque où le racisme fait trop souvent la Une de l’actualité, en France mais aussi aux États-Unis. Histoire de ne pas oublier ce qui s’est passé, histoire de ne pas oublier ceux qu’on a connus et reconnus à base de : « C’est pas ton ami ? »